Axes de recherche

L’organisation de la recherche de l’HiCSA par axes est consubstantielle à son identité. Issu de la réunion de plusieurs centres de recherches disciplinaires, qui correspondaient à la division académique de la discipline en aires chronologiques et/ou en champs dédiés à l’étude d’un médium, l’unité a accompli progressivement sa mue, afin de devenir un véritable laboratoire : un lieu de dialogue et de collaboration, perméable en interne et tourné vers l’extérieur. L’organisation choisie favorise ce fonctionnement. Nos pratiques évoluent régulièrement, tant pour des raisons internes, de bilan tiré des travaux achevés, de pyramide des âges et de recrutement, qui amènent à des renouvellements, que pour des raisons d’ouverture vers l’extérieur. Nous changeons parce que les enjeux du monde contemporain changent, apportant leur lot de débats et de nouveaux outils méthodologiques qui nous incitent à réactualiser régulièrement nos manières de faire. Nos axes sont à lire non de façon figée, mais comme une sorte de photographie d’un moment dans un mouvement continu, issu des mutations et conclusions tirées des bilans, mais aussi tourné vers les mutations futures et les enjeux en voie de développement.

Axes 2023 - 2027

  • Axe 1 : Genèse et poétique de l’œuvre

    Responsable Luisa Capodieci, Maître de conférences HdR

    En s’inscrivant pleinement dans la politique scientifique de transversalité de l’HiCSA, l’axe "Genèse et poétique de l’œuvre" est entrelacé aux trois autres dans une dynamique cohérente de dialogue, d’échange et de confrontation. Plus particulièrement, les recherches menées dans son cadre portent sur les multiples aspects de la création et de la vie de l’œuvre d’art, de sa genèse intellectuelle, à sa fabrication matérielle, à ses effets, à sa transmission.

    La temporalité interne de l’œuvre d’art, sa réception, sa ‘relationalité’ à l’environnement, sa conservation, ses éventuelles métamorphoses sémantiques et formelles sont autant des questions qui sont au cœur des recherches menées dans cet axe. Ainsi, on y étudie le « faire l’histoire » et on réunit, dans une synergie originale et fructueuse, des approches méthodologiques différentes qui vont de la création intellectuelle et manuelle, à l’histoire des idées et à l’idéologie.

    Ces orientations scientifiques sont aujourd’hui au cœur des enjeux patrimoniaux et des débats en histoire de l’art. Les projets et programmes de recherche, qui se sont déployés tout au long des dernières années, ont mobilisé les membres de l’HiCSA dans des collaborations avec d’autres universités, institutions de recherche et musées de divers horizons géographiques et disciplinaires. Ces occasions d’échange, de confrontation, de découverte ont été à l’origine de colloques et workshops internationaux en France et à l’étranger dans un souci de partage et de transmission à une échelle plus ample et ils ont fait l’objet de nombreuses publications imprimées et numériques.

     

  • Axe 2 : Cultures visuelles et archéologie des médias

    Responsable : Pascal Rousseau, Professeur des universités, directeur de l'ED441 Histoire de l'art

    Cet axe assume plus particulièrement la dimension « culturelle » et « sociale » affichée dans l’anagramme HiCSA. Il veille à intégrer au mieux les renouvellements méthodologiques au sein de la discipline histoire de l’art, en prenant en compte à la fois son tournant culturaliste et, au sein de ce dernier, sa dimension visuelle, rejoignant là le débat sur les cultures visuelles anglo-saxonnes (Visual Culture Studies) et leur importation tardive en France, alors même que leur légitimité académique rencontrait ses premières contestations de l’intérieur. Prenant en considération les nouvelles modalités du regard et l’investissement idéologique des images, l’axe « culture visuelle » vise donc à bousculer les contours d’une histoire des représentations centrée sur les canons académiques et/ou modernistes, pour faire entrer les corpus analysés dans un champ élargi des productions visuelles. Il s’agit, travaillant de la sorte, d’accorder une part importante à l’histoire sociale des savoirs, des techniques et des idées.

    Une telle démarche implique un fort élan inclusif opérant au profit de l’imagerie sociale et de ses circulations, tout en veillant à ne pas sacrifier les « fonctions esthétiques » de l’image. Il s’agit aussi de déplacer l’analyse des objets et des pratiques discursives vers les régimes de visualité et les dispositifs optiques impliqués dans l’observation des images. L’ambition, ici, est de donner aux images toute leur épaisseur sociale, historique et culturelle, en observant de plus près les usages et les comportements face à celles-ci, pour aborder non seulement une étude culturelle des régimes de vision mais une analyse sociale des régimes de visibilité.

    On retrouve les conséquences de ce parti pris dans les programmes de recherche et les journées d’étude associés à cet axe : d’une part on peut noter qu’une attention particulière est accordée au processus de fabrication et de production des images (mettant l’accent sur les facteurs, les acteurs et les conditions de la production), mais également à l’articulation politique entre production et réception, qui permet de se pencher en particulier sur le pouvoir d’agir des représentations.

    Cette inflexion conduit non pas à se satisfaire de voir dans l’œuvre d’art un indice ou un symptôme révélateur d’un état de la société (le fonds social de l’œuvre, ses effets de causalité, la réduction de l’œuvre à une illustration) mais invite à faire de la mobilité et du transfert des images une pratique sociale à part entière, susceptible d’être décrite, bien au-delà des questions de style et d’influences, en termes sociaux, politiques et culturels. Il s’agit également de porter une attention plus forte aux modélisations historiques du visuel, intégrant l’image et ses usages au sein d’un vaste réseau intermédial qui traverse les périodes, du Moyen-Age à la période la plus actuelle, notamment en évitant de s’encombrer des oppositions parfois sur-jouées entre cultures matérielles et visualité pour repenser les liens entre ces deux approches, moins concurrentes que prévu, pouvant faire tandem. Cette dernière remarque permet de mettre au jour le lien dialogique entre cet axe qui a émergé lors du dernier quinquennal, et les autres axes de l’HiCSA.

  • Axe 3 : Géopolitique de l’art

    Responsable : en cours de nomination

    Associée au champ de l’histoire de l’art, la notion de « géopolitique » pourrait surprendre, voire provoquer. Loin des notions de plaisir ou d’esthétique souvent associés à la relation à l’œuvre, la « géopolitique » renvoie à l’idée de conflits, de rivalités territoriales, et de guerre. Cette discipline d’abord façonnée en histoire politique, puis réinventée dans le domaine de la géographie, se voit de plus en plus souvent convoquée dans le domaine de l’art et de la culture.

    L’actualité des questions liées à l’instrumentalisation de la culture dans les conflits de mémoire (autour du mouvement de déboulonnement des statues, ou des restitutions des biens culturels à l’Afrique, notamment), ou de l’usage des œuvres et des imaginaires dans les conflits armés (en Syrie ou en Afghanistan, par exemple) rend cet angle d’approche particulièrement fécond et indispensable pour étudier les enjeux de société soulevés par l’histoire du patrimoine et des musées, l’histoire de l’art contemporain, du marché de l’art, l’histoire de la photographie ou du cinéma.

    Articulée au champ des études mondialisées (Patrick Boucheron, Pierre Singaravélou), connectées (Sanjay Subrahmanyam) ou globalisées (Hans Belting, James Elkins, J. Harris), l’approche géopolitique met l’accent sur la dimension politique des échanges, en invitant à décentrer les regards pour repenser les rapports de pouvoir, dans une perspective transhistorique et transnationale. Cet angle d’étude peu développé en histoire de l’art en France, positionne l’HiCSA dans un champ de recherche dynamique qui permettra de fédérer des projets en cours et à venir.

     

  • Axe 4 : Partimoines, patrimonialisations

    Responsable : Arnaud Bertinet, Maître de conférences, responsable du projet ANR "Arthothèques" (2023 - 2027)

    Depuis une quarantaine d’années Patrimoines et mémoires sont un sujet d’actualité, que ce soit à travers l’essor des musées et du collectionnisme, l’ampleur et la diversité des politiques patrimoniales dans un monde globalisé, ou encore l’émergence de la notion de patrimoine immatériel. Au-delà de cette actualité, c’était le constat du développement croissant des questions de mémoire et de patrimonialisation, toujours plus présentes dans les travaux des membres de l’HiCSA, qui motivait la création de cet axe. Celui-ci représente en effet un champ de recherches international, interdisciplinaire, qui interroge, au-delà de l’histoire et de l’histoire de l’art, d’autres sciences humaines et sociales : sociologie, anthropologie, ethnologie, et enjeux théoriques : post-colonial studies, global studies, gender studies. On le voit, cette approche dialogue sans cesse avec celle des trois autres axes porteurs des travaux de notre équipe.

    Les projets menés ont, dès lors, aussi bien pu porter sur l’histoire institutionnelle que sur la pédagogie de l’art et sa transmission, sur les instances de patrimonialisation, voire sur l’artialisation de pratiques n’appartenant pas, originellement, au monde dit des beaux-arts et qui participent de la richesse de la recherche de l’unité. Les questions de provenance des collections et de leurs restitutions, les mises en danger patrimoniales, omniprésentes actuellement, et déjà abordées dans la recherche des membres de l’HiCSA, se sont encore développées.

    La construction institutionnelle des discours sur les œuvres d’art, par les musées, par les commémorations, par la critique d’art, mais aussi par l’histoire de l’art en tant que discipline, au cœur des activités des chercheurs de l’unité depuis de nombreuses années, sont désormais des pôles incontournables de la recherche en histoire de l’art.

    Ainsi, faire de l’histoire de l’art c’est plus que jamais, au sein de l’HiCSA, accorder une place centrale à l’étude des œuvres, mais également, de manière indissociable, à leurs processus de patrimonialisation.

  • Programme expérimental transversal : Art et Ecosophie

    Responsable : Michel Poivert, Professeur des universités

    Ce programme traverse l’ensemble des axes du laboratoire. Il est né d’une conscience partagée par nos chercheurs des enjeux, liés à la notion d’anthropocène comme figure supra-historique, mais prégnante sur le plan d’une anthropologie de l’art.

    En précisant, à partir de la notion d’écosophie théorisée par Félix Guattari, les questions artistiques et esthétiques à une nouvelle ère – la mise en concordance des enjeux environnementaux, socio-politiques et des nouvelles subjectivités – l’équipe entend faire se rejoindre, au-delà des objets et axes d’études, les questions de renouvellement des consciences, dans le champ de la création et des productions artistiques.

    De l’œuvre d’art au patrimoine, des productions architecturales aux questions de visualité et de conservation-restauration, comment la conscience écosophique se pose-t-elle à notre époque ? La prise en compte de la nature abimée dans les processus de création, les enjeux écologiques des productions artistiques, la nouvelle figure du spectateur dans l’espace d’exposition, ou bien encore l’ouverture du patrimonial à des objets considérés comme des ruines du moderne… sont autant de sujets possiblement en partage. Ce programme transversal vise à unir plus fortement encore l’équipe de chercheurs de l’HiCSA aux grandes questions débattues au niveau international dans le monde de l’anthropologie de la culture. Il montre à la fois notre souci de repenser régulièrement nos champs de recherche, mais aussi notre maintien constant d’une pratique de l’histoire de l’art dans un champ élargi, qui donne à ce carrefour disciplinaire sa nécessité autant que son actualité.