
Art contemporain, migrations, expériences diasporiques
Appel à communication lancé par le groupe de recherche QUILT (Questionner les Intersections, les Liens et les Traversées) pour la journée d'étude :
Art contemporain, migrations, expériences diasporiques, qui se déroulera le jeudi 27 novembre 2025 à la Galerie Colbert (Paris 2e).
Date limite d'envoi des propositions : 10 mai 2025.
Informations / Contact : quiltgroupe@gmail.com
Crédit image : Rudy Dumas, Roller Coaster, 2024. Photographe : Aynkán Dropsy Giménez
Appel à communication
Cette journée d’études sera consacrée à l’exploration des pratiques artistiques contemporaines, en lien avec les dynamiques de mobilité et les expériences diasporiques. À la croisée de l’histoire de l’art, des études culturelles et des sciences sociales, cette journée examinera les façons dont les migrations, les exils, et les circulations transnationales façonnent la création, la diffusion et la réception des œuvres d’art. L’objectif est de mettre en lumière les trajectoires complexes d’artistes en déplacement ainsi que les réseaux d’échanges qu’ils ont contribué à tisser à travers les frontières culturelles et géographiques.
En abordant les migrations et la diaspora dans le contexte de la production artistique, il est également essentiel de revitaliser l’aspect discursif de ces concepts et de dépasser l’attachement exclusif aux territoires physiques comme seuls espaces relationnels intégrés. Ainsi, au cœur de cette manifestation se trouve la question de l’identité dans le contexte du déplacement. L’identité des sujets diasporiques a longtemps été façonnée par des frontières d’inclusion et d’exclusion, oscillant entre appartenance et altérité. Pour Stuart Hall, la diaspora ne se définit pas par un retour à une origine unique et pure, mais par une identité en constante transformation, marquée par l'hybridité et la diversité des expériences. Plutôt qu’un simple exil, la diaspora est, toujours selon Hall, un espace de production identitaire où l'histoire, la mémoire et les déplacements redéfinissent sans cesse l’appartenance et les formes de représentation culturelle. En contestant ces frontières, l’« espace diasporique » emprunté de Avtar Brah devient le lieu central des passages entre les définitions essentialistes de l’identité imposées par le nationalisme exilique et un « transnationalisme diasporique » qui valorise la subjectivité et l’identité personnelle.
En revisitant des récits historiques souvent centrés sur des paradigmes nationaux ou occidentaux, cette manifestation vise à enrichir les cadres d’analyse actuels en intégrant des perspectives transnationales, interculturelles et décentrées. Nous encourageons des propositions analysant des productions artistiques en appliquant des méthodologies issues de l’histoire de l’art mais aussi de l’histoire, l'anthropologie, la sociologie, les études postcoloniales, les études culturelles. Les propositions émanant de chercheur·es indépendant·es, de commissaires d’exposition, d’artistes, d’étudiant·es, doctorant·es, de jeunes chercheur·es sont bienvenues.
Axes
Quatre axes sont proposés, qui visent à orienter les contributions tout en laissant une large place à des propositions originales qui pourraient enrichir le cadre général de la recherche :
Axe 1 : Esthétiques de la dispersion
Cet axe de recherche propose une réflexion sur l’expression artistique, ses processus et ses approches conceptuelles au sein de l’art contemporain, envisagé comme un espace privilégié où les artistes issus des diasporas expérimentent et négocient leurs identités subjectives. Il s’agira d’analyser comment ces artistes interrogent les notions traditionnelles d’appartenance et contribuent à la création d’espaces alternatifs permettant d’explorer l’identité au-delà des frontières géographiques et symboliques. En s’attachant aux pratiques artistiques, aux médiums mobilisés et aux modalités de création, cet axe vise à interroger l’esthétique de la dispersion en tant que mode d’expression du déplacement et de l’exil. Plutôt qu’un langage universel figé, elle peut être envisagée comme une constellation de formes et de processus qui traduisent diverses expériences du déplacement. Dans cette perspective, l’histoire de l’art peut-elle être réécrite à partir de l’étude de ces pratiques artistiques diasporiques ? Peut-elle s’inscrire dans un espace discursif original où la dispersion constituerait à la fois une modalité créative singulière et une condition esthétique partagée à l’échelle globale ?
Axe 2 : Représenter les diasporas
Un enjeu majeur de cette réflexion portera sur la représentation des circulations et des migrations en dehors des figures stéréotypées de l’errance et du vagabondage. Si l’imaginaire artistique a souvent associé les trajectoires migratoires à l’idée de perte ou de déracinement, voire à l’incarnation de la liberté prônée par la bohème, il convient d’examiner comment les artistes contemporain·e·s issu·e·s de la migration proposent d’autres modes de narration, en passant notamment d’un mode d’hétéro-représentation à celui d’une auto-représentation. Néanmoins, ces formes d’auto-représentation restent parfois contraintes par des attentes figées de la réception européenne ou occidentale, qui tendent à assigner les artistes à des récits de souffrance ou d’exil. En interrogeant les notions de double appartenance et d’hybridité culturelle, cet axe portera particulièrement sur les œuvres opérant une déconstruction d’une iconographie notamment orientaliste ou misérabiliste et en questionnant les cadres de perception qui continuent d’influencer la réception des œuvres issues des migrations. Quelles images, quelles techniques concrètes et quels dispositifs plastiques, performatifs ou visuels sont mobilisés pour exprimer la complexité des appartenances multiples ?
Axe 3 : Politiques d’exposition
Les biennales et expositions internationales ont longtemps été structurées par des récits nationalistes, présentant les styles et écoles comme le reflet direct d’identités nationales.
Pourtant, certaines manifestations ont cherché à dépasser ce modèle, privilégiant des critères esthétiques et transnationaux et abandonnant les sélections nationales. Dans ce cadre, il s'agira d'examiner les expositions et leurs sources (catalogues, archives, presse) comme des lieux où se définissent ou se contestent les cadres politiques et artistiques qui façonnent les pratiques des artistes issus des diasporas. Leurs stratégies d’exposition peuvent répondre à un double enjeu : d’une part, intégrer les mondes de l’art et les réseaux institutionnels en négociant avec les discours et cadres prédéfinis qui orientent leur réception ; d’autre part, créer des contre-espaces politiques et artistiques, hors des institutions, pour s’émanciper des contraintes imposées et proposer des modes alternatifs de transmission et de visibilité.
Axe 4 – Art, migrations et postcolonialisme
Cet axe propose d'explorer les manifestations artistiques – œuvres plastiques, performances, installations, films, etc. – qui interrogent la migration en lien avec l'histoire coloniale et ses prolongements contemporains. Il s'agit d'étudier comment les artistes abordent les circulations humaines, matérielles et culturelles induites par les dynamiques coloniales, ainsi que les formes d'hybridation, de créolisation ou de résistance qui en découlent. Les propositions pourront analyser la manière dont les œuvres questionnent les mémoires coloniales, rendent visibles les trajectoires migratoires issues des contextes postcoloniaux ou revisitent les imaginaires géographiques hérités de l'histoire impériale. Cet axe s’ouvre également à une réflexion sur les conceptions spatiales et temporelles adoptées par les artistes qui s’occupent de relier l’actualité des migrations à l’histoire coloniale. La remise en cause des pratiques cartographiques, la fragmentation des temporalités et l'imbrication des espaces semblent n’être que quelques-uns des modes récurrents dans la pratique des artistes, dont la contribution à la réflexion en question reste encore largement à explorer.
Dans ce cadre, le groupe de recherche QUILT (Questionner les Intersections, les Liens et les Traversées) se propose d’étudier comment ces thématiques nourrissent les pratiques artistiques contemporaines et leurs inscriptions théoriques. Cette journée d’études est organisée sous la responsabilité scientifique de la Professeure Elvan Zabunyan, garantissant ainsi l’encadrement institutionnel et académique de cette réflexion.
Modalités de soumission
Les propositions de communication (1500-2000 signes maximum), accompagnées d’une courte biographie, sont à envoyer avant le 10 mai à quiltgroupe@gmail.com
Direction scientifique
Elvan Zabunyan (Professeure des universités – Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Organisation
Varduhi Kirakosyan (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – HiCSA), Marguerite Leroy (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – HiCSA), Monica Seiceanu (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – HiCSA), Sara Sicolo (Sorbonne Université - Paris 4), Elora Weill-Engerer (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – HiCSA – INHA)