Histoire des patrimoines et des musées
Présentation
L’extension et la pluralisation de la notion de patrimoine(s), opérée depuis un demi-siècle, montrent à quel point les enjeux qui lui sont associés sont devenus centraux dans les sociétés contemporaines. Selon des jeux d’échelles combinées de la cathédrale à la petite cuillère, et du local au global, les instances patrimoniales initient ou appliquent des politiques, dont l’administration a des visées variables, d’ordre historique, mémoriel ou communautaire, qui ne sont jamais dépourvues d’idéologie. S’il ne fait plus doute que les sociétés ont la charge de conserver pour transmettre, en restaurant et documentant le patrimoine dont chacun n’est que le dépositaire transitoire, les objets du patrimoine et les vifs débats qu’ils suscitent dans le cadre de mouvements critiques ou de mobilisations militantes, fortement médiatisées et parfois mondialisées, indiquent qu’il s’agit désormais de questions pleinement attachées à la citoyenneté.
Les héritages du passé ne sont plus considérés comme inscrits dans la permanence de la loi, la continuité des institutions culturelles ou l’inaliénabilité des collections muséales. Les restitutions d’œuvres spoliées pendant les guerres ou la colonisation, la contestation des statues publiques célébrant des valeurs problématiques, les revendications pour la qualification patrimoniale d’objets ou de cultures sont autant d’indices d’un changement de paradigme historique de plus en plus discuté, en rupture avec l’hégémonie de la matrice héritée des Lumières et de la Révolution française, entre condamnation du vandalisme et invention du musée comme lieu de la protection infinie et d’une prétendue neutralisation. Le patrimoine n’est plus l’apanage exclusif des professionnels auxquels la société en a longtemps délégué les charges de conservation technique, de constitution d’un savoir scientifique et de médiation sociale. Les citoyen.nes en sont aussi les co-constructeurs et les cogestionnaires, qui s’en sont approprié la cause avec émotion, en n’étant plus seulement les récipiendaires ou les usagers de politiques descendantes. D’autant qu’ils assument d’en être les connaisseurs et les acteurs, conscients de leur attachement non seulement à des monuments, des sites, des artefacts ou des chefs-d’œuvre, mais aussi à des pratiques, des savoirs, des savoir-faire et des croyances relevant d’un patrimoine culturel immatériel susceptible d’intéresser une communauté, si ce n’est l’humanité.
L’histoire des patrimoines, telle qu’elle se pratique à l’HiCSA, c’est-à-dire au sein d’un laboratoire d’histoire de l’art, entend interroger l’épistémê des Heritage studies en contribuant à la renouveler, par une approche pluridisciplinaire – historienne, anthropologique, ethnographique et sociologique – des instances et processus de patrimonialisation des œuvres et des cultures, par l’étude des institutions, lieux et dispositifs, des discours et pratiques attachés à la conservation, à la protection et à la restauration qu’implique la transmission du patrimoine. Les travaux développés à l’HiCSA s’inscrivent dans une perspective transnationale également ouverte aux enjeux passés et présents du collectionnisme, de la muséification, de l’artialisation ou de la muséographie.
Spécialistes
Bertrand Tillier, Professeur des universités
Delphine Burlot, Maîtresse de conférences HdR
Arnaud Bertinet, Maître de conférences
Yaël Kreplak, Maîtresse de conférences Chaire Delphine Lévy
Dominique Poulot, Professeur émérite